Comment acheter le véritable savon de Marseille ? Comment le reconnaître ? A-t-il vraiment des vertus ? Pourquoi ce cube irrégulier est-il si connu ? Partons à la rencontre du savon de Marseille.
Le Savon de Marseille n’est ni une marque, ni une appellation. Petit savon n’est pas protégé. Contrairement à ses collègues régionaux AOP huile d’olives de Provence ou AOP Côtes de Provence, le savon de Marseille n’a pas de titre. N’importe qui peut faire un savon et l’appeler de Marseille. Et rien n’y fait. Les producteurs locaux ont déposé encore récemment une demande d’IGP, en 2016, retoquée. Merci, mais non merci. Pourtant l’idée d’une appellation est dans la mouvance actuelle : un produit naturel, écologique, doux pour la peau, suivant une tradition historique vieille de 600 ans. Il y a même un édit datant de 1688 publié par Colbert qui décrit ce que doit être un véritable savon de Marseille.
Mais au fait, c’est quoi un véritable savon de Marseille ?
Cela doit être un pain. Pas de liquide, car qui dit liquide dit eau, qui dit eau dit bactéries, qui dit bactéries dit conservateurs. Et dans le savon de Marseille, point de conservateurs.
Les seuls ingrédients que l’on retrouve dans notre savon sont au nombre de trois : l’huile, l’eau, la soude caustique.
Les 72% d’huile doivent être végétales. La tradition veut que cette huile soit de l’huile d’olive, mais aujourd’hui on peut aussi ajouter de l’huile de Coprah fabriquée à partir de la noix de coco. L’huile de Coprah donne au savon son côté moussant, l’huile d’olive sa couleur verte. Car le jeune savon de Marseille est tout vert. En vieillissant, sa robe se ternit. Vert tendre ou beige, jeune ou vieux, le savon garde quoiqu’il en soit toutes ses vertus.
Enfin, le savon de Marseille ne doit pas être parfumé. Il n’est ni à la lavande, ni au citron. Neutre, tout simplement.
Voilà un savon parfait pour nettoyer votre peau, tout doux, qui n’assèche pas et qui est très économique. L’essayer, c’est l’adopter. Il existe un autre savon de Marseille, celui que les lavandières utilisaient autrefois, celui qui possède des vertus détergentes. La recette est la même, l’huile est différente, mélange d’huile de palme et de coprah. Pas de couleur verte, mais un beau beige. Plus on met de l’huile de coprah, plus sa couleur blanchit.
Mais alors, pourquoi un savon à Marseille ?
Marseille, ce grand port de commerce, accueille dès le XIème siècle des bateaux revenus des croisades transportant des trésors du Moyen Orient.
L’une de ces curiosités est un savon à base d’huile d’olive et d’huile de baies de laurier venu de Syrie : le célèbre savon d’Alep.
Il est rapidement adopté par la population provençale, puis au XIVème siècle on finit par le copier. Le savon de Marseille est né.
Et sa forme cubique ?
Pour faire du savon de Marseille, il faut donc d’après la tradition 72% d’huile d’olive, 8% de soude caustique, 20% d’eau. Hop, on jette les ingrédients dans un grand chaudron. Commence alors le processus de l’empatage ou saponification à chaud. Il s’agit de chauffer les ingrédients à une température de 120 degrés afin de les transformer en pâte de savon. Le chaudron est allumé en journée, éteint la nuit. Une croûte se forme alors, que l’on casse au petit matin afin d’éviter toute explosion. Dangereux l’empatage ? Un peu, c’est pourquoi les savonneries ont interdiction de s’établir en centre-ville. On les retrouve dans les quartiers industriels.
Après quatre jours de ce traitement, nous voici avec une belle pâte marron. Marron ? Mais le savon à base d’huile d’olive n’est-il pas censé être vert ?
Notre pâte de savon est encore pleine de soude, dont il faut se débarrasser. On la lave à l’eau de mer, le sel attirant la soude, puis on la rince à l’eau claire. L’eau ayant une densité inférieure à la pâte de savon on procède au relargage de l’eau par-dessous pendant 4 jours. Ça y est, notre pâte est bien verte, et on la coule dans une mise, un gros quadrilatère. Il suffit alors d’attendre que la pâte sèche, et on découpe des blocs de 10 kilos. Puis, avec un fil à découper, on tranche de beaux cubes. La forme du savon de Marseille est inventée !
Aujourd’hui point de blocs, point de fils, on refroidit instantanément la pâte et on la transforme en billes. On peut alors en la réchauffant lui donner la forme que l’on veut. Le Savon de Marseille peut être de nos jours carré, rond, ou rectangulaire.
Mais alors, je l’achète où mon savon de Marseille ?
Ils sont bien peu nombreux les producteurs de véritables Savons de Marseille. Au nombre de quatre dans la cité phocéenne, ils répondent aux noms de Fer à cheval, Le Sérail, La Savonnerie du Midi, La Grande Savonnerie. A Aix-en-Provence on retrouve Marius Fabre et Rampal La Tour. Tous proposent de vrais savons de Marseille réalisés dans la tradition.